jeudi 27 février 2014

Une histoire américaine








"C'est seule que je suis la plus heureuse" - Jackie Kennedy





Jacqueline Kennedy
Conversations inédites avec
 Arthur M. Schlesinger - 1964




Pour qui s'intéresse à l'histoire américaine de l'après-guerre, et notamment à celle de la famille Kennedy, le livre d'entretiens entre Arthur Schlesinger et Jackie Kennedy est assez édifiant. Cet historien, ancien conseiller spécial de John Fitzgerald Kennedy, s'est entretenu, plusieurs mois après la mort du président, avec l'ex première dame. Ces conversations, à bâton rompu, enregistrées au magnétophone, ont été retrouvées par Caroline Kennedy, après le décès de sa mère. Considérant qu'elles constituaient un apport historique intéressant, elle a décidé de les publier et a rédigé la préface de l'ouvrage.


Ils ont le grand mérite d'éclairer la personnalité de Jackie, sous un angle différent de celui auquel les medias nous ont habitués. On y voit une femme très consciente et bien informée des enjeux de la politique américaine dans le monde. Certaines idées reçues, véhiculées par la presse française, à l'époque du voyage officiel du couple Kennedy, à l'invitation du Général de Gaulle, sont battues en brèche, notamment en ce qui concerne les relations franco-américaines. La thèse officielle étant que la First Lady aurait été séduite par la personnalité du Général, et réciproquement, lequel était sensible à sa beauté, au fait qu'elle parlait le français, et faisait montre d'une certaine culture relative à notre pays, où elle avait séjourné durant ses études.


On s'aperçoit en fait qu'elle éprouvait peu de sympathie pour le Général, qu'elle trouvait arrogant, et qui a ses yeux avait un énorme défaut, celui de faire preuve d'indépendance à l'égard de la politique américaine, et de remettre en question son hégémonie, ce qu'elle considérait comme parfaitement déloyal. On la voit ainsi incarner avec force, l'un des traits dominants de la mentalité américaine, à savoir : hors de l'Amérique, point de salut, et quiconque s'y oppose est considéré comme un ennemi.



Le livre est aussi l'occasion d'en savoir un peu plus sur la manière dont John Kennedy traitait avec ses opposants politiques, ne cherchant jamais à imposer son point de vue immédiatement, mais oeuvrant patiemment pour les convaincre, voire les anéantir ; stratégie qu'il employait également dans le domaine des relations internationales, excepté dans l'affaire de Cuba, où il s'est montré plus brutal, avec les écueils que l'on sait.


On y voit enfin une femme, libérée du devoir de réserve et du poids diplomatique, fustigeant de manière ironique certains grands de ce monde, dont Indira Gandhi, elle aussi grande opposante au diktat américain, au sein de l'Organisation des Non Alignés, avec laquelle, manifestement, le courant n'est pas passé.



Jackie Kennedy, n'était pas qu'une belle image, elle savait aussi, comme ça, l'air de rien, de sa voix  lente, douce et sexy, susurrer des propos à fleuret moucheté, n'hésitant pas à travestir la réalité sur un ton amer, empreint d'un certain mépris. Ils sont l'un des aspects surprenants de ce livre, mais certainement pas le seul.




Christine Filiod-Bres
Le 27/02/2014
   

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