mardi 16 décembre 2014

Poésie - Fourvoyée










Wong Kar Waï - In the mood for love







Fourvoyée



Du plus loin qu'elle se souvienne
Elle avait toujours recherché l'harmonie
Mais elle n'était pas de ce monde
Fourvoyée, elle s'était fourvoyée


Que lui restait-il désormais
Sinon revenir à elle-même
Sur le chemin d'une infinie sagesse
Qui calmerait son désarroi


Mais la blessure était profonde
Elle n'avait plus beaucoup de temps
 Pour retourner au royaume des apparences
Et fermer la porte à jamais






Christine Filiod-Bres
décembre 2014 


samedi 13 décembre 2014

Femmes de Ciudad Juarez







Ciudad Juarez - Frontière Mexique - Etats-Unis





Femmes de Ciudad Juarez



 Mortes deux fois
 Femmes de la frontière

Découpées, dépecées, dévorées
Chacals aux aguets

Abandonnées sur l'herbe des talus
Tortionnaires invisibles

Quels furent leurs rêves, leurs désirs
Gisantes sous la lune

Qui sait quel est leur nom
Oubliées, sans passé

Personne ne veut le dire
Linceul de silence







Christine Filiod-Bres
14 décembre 2014

jeudi 4 décembre 2014

Ella Maillart








"J'étais au début d'un voyage tout nouveau qui devait me conduire plus avant vers la vie complète et harmonieuse que je cherchais instinctivement."






1903 - 1997



Ella Maillart




A Nicolas Bouvier, qui la questionnait sur la route Genève-Madras, elle avait dit "Partout où les hommes vivent, un voyageur peut vivre aussi."



"Parmi la jeunesse russe" en 1930, en Mandchourie en 1934, en Inde par le Sin Kiang et l'Ouest de la Chine, à Katmandou bien avant que ce ne soit la mode, Ella Maillart a promené son regard bleu glacier, "Des monts célestes aux sables rouges", et pour celui qui ne voyagerait que dans sa chambre, ses livres seront toujours un précieux viatique.



Christine Filiod-Bres
5 décembre 2014





























mardi 25 novembre 2014

Petit poème en prose - Le hasard






 Hasard




Giorgio de Chirico - L'Enigme de l'arrivée








Le hasard est mon ami

Fidèle

Il vient toujours à ma rencontre






Christine Filiod-Bres
25 novembre 2014

samedi 1 novembre 2014

Poésie - Elle était si gentille







Elle était si gentille







Elle était si gentille
Eplorée, attentive
L'histoire était si triste

Elle avait joué son rôle
Dans ce théâtre d'ombres
Longtemps confiante

Elle donnait beaucoup
Ombre silencieuse
Mais ne demandait rien

Tout était pour le mieux
Dans le meilleur des mondes
Elle était si gentille




 The Velvet Underground & Nico



Christine Filiod-Bres
1er novembre 2014

vendredi 31 octobre 2014

Les Malheurs de Sophie - L'enterrement de la poupée
















L'enterrement


(Extraits)





"Camille et Madeleine arrivèrent un matin pour l'enterrement de la poupée : elles étaient enchantées ; Sophie et Paul n'étaient pas moins heureux.


On plaça la boîte sur un brancard que la maman leur avait fait faire. Elles voulaient toutes le porter : c'était pourtant impossible, puisqu'il n'y avait place que pour deux. Après qu'ils se furent un peu poussés, disputés, on décida que Sophie et Paul, les deux plus petits, porteraient le brancard, et que Camille et Madeleine  marcheraient l'une derrière, l'autre devant, portant un panier de fleurs et de feuilles qu'on devait jeter sur la tombe.



Comtesse de Ségur née Rostopchine


Les enfants se mirent à creuser la fosse, ils y descendirent la boîte, jetèrent dessus des fleurs et des feuilles, puis la terre qu'ils avaient retirée ; ils ratissèrent promptement tout autour et y plantèrent des lilas. Pour terminer la fête, ils coururent au bassin du potager et y remplirent leurs petits arrosoirs pour arroser les lilas ; ce fut l'occasion de nouveaux jeux et de nouveaux rires, parce qu'on s'arrosait les jambes, qu'on se poursuivait et se sauvait en riant et en criant.


On n'avait jamais vu un enterrement plus gai. Il est vrai que la morte était une vieille poupée, sans couleur, sans cheveux, sans jambes et sans tête, et que personne ne l'aimait ni ne la regrettait. La journée se termina gaiement : et lorsque Camille et Madeleine s'en allèrent, elles demandèrent à Paul et à Sophie de casser une autre poupée pour pouvoir recommencer un enterrement aussi amusant."



Photo Lady Clementina Hawarden


Comtesse de Ségur
Les Malheurs de Sophie
31 octobre 2014


La poupée de Sophie








La poupée de Sophie










"La poupée vécut très longtemps bien soignée, bien aimée ; mais petit à petit elle perdit ses charmes, voici comment.


Un jour, Sophie pensa qu'il était bon de laver les poupées, puisqu'on lavait les enfants ; elle prit de l'eau, une éponge du savon et se mit à débarbouiller sa poupée ; elle la débarbouilla si bien qu'elle lui enleva toutes ses couleurs : les joues et les lèvres devinrent pâles comme si elle était malade, et restèrent toujours sans couleur.

 Sophie pleura, mais la poupée resta pâle.

Une autre fois, Sophie songea qu'un bain de pieds serait très utile à sa poupée, puisque les grandes personnes en prenaient. Elle versa de l'eau bouillante dans un petit seau, y plongea les pieds de la poupée et, quand elle la retira, les pieds s'étaient fondus, et étaient dans le seau.


Sophie pleura, mais la poupée resta sans jambes.



Depuis tous ces malheurs, Sophie n'aimait plus sa poupée qui était devenue affreuse, et dont ses amies se moquaient ; enfin, un dernier jour, Sophie voulut lui apprendre à grimper aux arbres ; elle la fit monter sur une branche, la fit asseoir ; mais la poupée, qui ne tenait pas bien, tomba : sa tête frappa contre des pierres et se cassa en cent morceaux.


Sophie ne pleura pas, mais elle invita ses amies à venir enterrer sa poupée."



Comtesse de Ségur
Les malheurs de Sophie
31 octobre 2014  

mardi 28 octobre 2014

Petite forme courte à propos des Malheurs de Sophie.






Chez la Comtesse de Ségur, les Papas sont toujours à Paris ...



Photo Clementina Hawarden






"Ma Bonne, ma Bonne, dit un jour Sophie en accourant dans sa chambre, venez vite ouvrir une caisse que Papa m'a envoyée de Paris, je crois que c'est une poupée de cire, car il m'en a promis une."




Comtesse de Ségur
Les malheurs de Sophie


28 octobre 2014 

jeudi 23 octobre 2014

Exercice d'admiration









Exercice d'admiration





Photo Clementina Hawarden






Depuis tant d'années, Madame V... est rompue à l'exercice d'admiration, mais ça ne la satisfait guère, elle y a perdu son âme et ne retrouve plus les chemins de la liberté. Sa souffrance est extrême, mais elle lui impose le silence car elle n'a pas d'alternative.





Christine Filiod-Bres
23 octobre 2014










lundi 13 octobre 2014

Elle ne sait plus qui je suis







Elle ne sait plus qui je suis








Elle ne sait plus qui je suis
Ne me parle plus, ne me voit plus
Elle est hors du monde


Elle est comme une inconnue
Si proche et si lointaine
Entre nous le silence



Elle ne me dira plus
Qu'elle aimait Natacha
 Thérèse, sa sainte souriante



Lioudmila Savelieva - Guerre et Paix - Sergeï Bondartchouk



Elle ne sera plus jamais
Cette fille en robe blanche
Qui a tant renoncé, sacrifié au devoir


Elle est en fin de vie, prostrée
Dans cette chambre un peu triste
C'est fini, elle  ne sait plus qui je suis





Thérèse de Lisieux



Christine Filiod-Bres

13 octobre 2014

mercredi 8 octobre 2014

La condition pavillonnaire - Sophie DIVRY









Janet Hill




La Condition Pavillonnaire

Sophie DIVRY




La Condition Pavillonnaire, c'est un peu "Desperate Housewives" en Savoie et dans le Nord Isère, durant les Trente glorieuses jusqu'à nos jours.


L'héroïne de Sophie DIVRY, prénommée M.A., clin d'oeil appuyé au plus célèbre archétype féminin de la littérature française, travaille dans une entreprise et élève ses enfants, dans une de ces zones pavillonnaires à la lisière de nos grandes villes, sorte de cités se voulant radieuses, pensées par des urbanistes et des politiques, à destination de la classe moyenne.


Où l'on voit cependant, que l'insatisfaction féminine a encore de beaux jours devant elle en littérature, à travers le récit de la vie d'une femme, confrontée au vide existentiel et qui, pétrie des idéaux de sa jeunesse, n'aurait pas imaginé que ça allait se passer comme ça ...


Un récit juste, ironique et sans concessions, qui nous rappelle, s'il en était besoin, que comme le disait Witold Gombrowicz, dont ce fut le credo, la jeunesse est le bien le plus précieux, mais qu'hélas, il est parfois trop tard, lorsque l'on prend conscience que l'on s'est peut-être fourvoyé.


Christine Filiod-Bres
8 octobre 2014










Sophie DIVRY










lundi 6 octobre 2014

LEVIATHAN - Andreï Zviaguintsev









LEVIATHAN

Un film de Andreï Zviaguintsev




Tous ceux qui ne craignent pas d'empoigner la réalité, qui considèrent que le cinéma n'est pas qu'un divertissement, et qui s'interrogent sur l'état du monde, seront touchés, voire bouleversés par "Léviathan", le dernier film du jeune réalisateur russe, Andreï Zviaguintsev.


On retrouve ici l'atmosphère si particulière, et l'envergure considérable, déjà entrevues dans le magnifique "Le retour", puis dans "Elena", qui fait une grande part de la richesse de l'oeuvre de ce cinéaste, qui démontre à bien des réalisateurs français, que filmer c'est tout de même autre chose que ce qu'ils nous proposent en règle générale, sclérosés qu'ils sont parfois par la pauvreté de leur écriture cinématographique, et leur parti-pris bourgeois.



Dans ce film, dont on ne sort pas indemne, et qui nous poursuit longtemps, Zviaguintsev nous donne à voir le fonctionnement de la société russe, par le biais du combat infernal que livre son héros, Kolia, aux prises avec les forces du mal et de la corruption qui innervent les institutions et le pouvoir politique, lesquelles le poussent au désespoir et à quitter sa maison, sur les bords de la Mer de Barents, où il vit avec sa seconde épouse, et son fils, adolescent rebelle, en lutte ouverte contre sa belle-mère.


Alexeï Serebriakov dans le rôle de Kolia


Les premières images nous montrent Kolia, venu accueillir à la gare, son ami avocat arrivant de Moscou, chargé d'assurer sa défense dans le procès qui l'oppose au Maire de la commune, lequel cherche à tout prix à s'emparer de sa maison et surtout de son terrain, pour satisfaire un projet, dont on se doute qu'il tirera de considérables bénéfices.


A ce titre, la scène du réquisitoire du jury, exclusivement féminin, est magistrale, et nous laisse au bord de l'asphyxie, tant le débit précipité de la juge qui énonce les attendus sur un ton monocorde, crée un profond malaise, symbolise la tragédie à l'oeuvre, et personnifie l'engrenage par lequel Kolia  sera broyé.


Cependant, qu'on ne s'y trompe pas, si Zviaguintsev nous parle de la Russie, de son fonctionnement social, politique et religieux, par le biais d'un évêque orthodoxe sentencieux, il nous parle aussi de l'état de notre monde, et des abîmes dans lequel il est plongé, gangrené par la corruption et l'avidité.



Un autre grand mérite de ce film, qui comme toutes les grandes oeuvres, part du singulier pour toucher à l'universel, s'illustre pleinement dans le très beau et pathétique personnage de Lilya, la compagne de Kolia, laquelle, partagée entre l'estime et le respect qu'elle éprouve pour lui, mais usée par sa lutte et le conflit qui l'oppose à son beau-fils, trouve un semblant d'échappatoire dans un adultère qui pourrait enfin la réveiller du grand sommeil où elle était plongée, et élargir son horizon, mais que sa loyauté précipitera dans le désespoir.


Elena Lyadova dans le rôle de Lilya


Dans ce monde sans pitié, la morale est totalement absente. Chez Zviaguintsev, l'honnêteté ne sauve personne, bien au contraire, et Kolia  en a déjà pris conscience, lorsque dans une scène poignante, il interpelle un pope, en lui demandant où est son Dieu de miséricorde, et se voit répondre, à travers la parabole de Job, qu'il doit se soumettre à sa volonté, qu'on ne saurait se révolter contre lui, et que la fuite du temps aplanit les épreuves. A cet instant là, les dés sont  jetés et Kolia a perdu tout espoir, ce qui achèvera de le détruire.



Cette description terrible d'une certaine condition humaine, n'est cependant pas exempte d'humour, bien aidé par la faramineuse consommation de  vodka, qui on le voit bien, fait office de pansement sur tous les maux des Russes, et s'illustre au cours d'une scène extraordinaire et drôlatique, où les protagonistes, réunis au cours d'un barbecue, s'exercent au tir sur des cibles représentées par les portraits des récents dirigeants de la défunte Union soviétique, où Boris Eltsine ne figure pas "parce qu'il n'était pas à la hauteur" ... de même que les actuels dirigeants au pouvoir, "parce qu'on n'a pas encore le recul historique" ...


On ne saurait avoir tout dit de ce film, si on n'évoque pas le sentiment de plénitude éprouvé à travers les images magnifiques et insolites, de cette région de la Mer de Barents, à la fois fascinante et inquiétante, de ces villages tristes et désolés, le tout magnifié par la musique de Philip Glass.


Enfin, comme ordinairement dans tous les films de Zviaguintsev, les acteurs y sont formidables, tous d'une justesse absolue. Alexeï Serebriakov, est remarquable dans le rôle de Kolia et force l'admiration, de même que la belle Elena Lyadova, dans celui de  Lilya. Mention spéciale à Roman Madyanov, passionnant dans le rôle du Maire, personnage à la fois veule et vindicatif, impitoyable et cynique avec les faibles, et obséquieux avec les puissants, tout droit sorti d'un roman de Gogol.


Un film d'une grande beauté formelle et d'une force extraordinaire, qui est un nouveau jalon dans dans la filmographie prodigieuse d'Andreï Zviaguintsev.


Andreï Zviaguintsev







Christine Filiod-Bres
6 octobre 2014




lundi 29 septembre 2014

Petit poème en prose - Pavillon d'or





Kyoto (Japon) - Le pavillon d'or





Un siècle dévasté

Pavillon d'or

Seppuku de Mishima






Yukio Mishima - 1925 - 1970






Christine Filiod-Bres
2013

vendredi 12 septembre 2014

Petit poème en prose - La joueuse de shamisen











Photo C. FB - collection personnelle





La joueuse de shamisen

Ombre silencieuse

Ne sait pas parler d'elle





Christine Filiod-Bres
Vert Céladon
septembre 2014



samedi 16 août 2014

Cinéma - Le grand paysage d'Alexis Droeven











Le grand paysage d'Alexis Droeven

un film de Jean-Jacques ANDRIEN (Belgique)



Ceux qui n'aiment pas la lenteur au cinéma, les paysages dans la brume, que les mutations du monde agricole indiffèrent, de même que les violentes luttes sociales et linguistiques en Belgique, passeront leur chemin ; mais moi j'ai aimé ce film du réalisateur belge Jean-Jacques Andrien, qui date de 1981, et qui a fait l'objet d'une discrète reprise en salles, en 2014. Mention spéciale du Jury à Berlin, en 1981, lors de sa sortie.


Un jeune fermier, interprété par l'acteur polonais, Jerzy Radziwilowicz, à la mort de son père, leader syndicaliste agricole, incarné avec la force qu'on lui connait, par Maurice Garrel, s'interroge sur son avenir, cherche des repaires, et une aide affective et morale, auprès de sa tante, personnage auquel Nicole Garcia apporte la sensibilité, et la sobriété qui la caractérisent, avec cette voix si douce et singulière, qui fait merveille, dans la lecture en off, d'une lettre émouvante, juste, et très belle, adressée à son neveu.



Jerzy Radziwilowicz et Nicole Garcia


Le film nous éclaire aussi sur la violences entre les deux communautés linguistiques de Belgique, à la fin des années soixante dix, à travers l'incursion d'images d'actualité, mettant l'accent sur ce thème extrêmement douloureux et préoccupant pour les Belges.



Emeutes dans la région belge des Fourons (scènes d'actualité)


La fin d'une certaine vision du monde agricole, même si on est là chez les grands producteurs de lait, les paysans n'étant plus désormais que "les gardiens du paysage", est aussi évoquée avec acuité par le réalisateur, grand connaisseur de ce thème,  et les graves questions suscitées, sont plus que jamais d'actualité.  


Un film qui donne à réfléchir, sur la manière dont chacun de nous aborde les remises en question, parfois inévitables, lorsque nous perdons un être cher, et singulièrement lorsqu'il s'agit de la figure du père, le tout orchestré par la rumeur du monde, et son étreinte inéluctable.


Christine Filiod-Bres
16 août 2014


Maurice Garrel




Reprise 




vendredi 15 août 2014

Petit poème en prose - L'homme penché










L'Homme penché




Lyon - Jardin du Musée des Beaux Arts - Auguste Rodin - L'Ombre ou Adam





Dans le jardin des Bénédictines

Refuge en ce monde

L'homme penché est indifférent





Christine Filiod-Bres
15 août 2014





Lyon - Le Jardin du Musée des Beaux Arts

mercredi 13 août 2014

Littérature - Anaïs et Catherine Pozzi






Anaïs NIN et Catherine POZZI

Journaux




Entre le Journal d'Anaïs NIN et celui de Catherine POZZI, je choisis celui d'Anaïs NIN.



Anaïs NIN - 1903- 1977 

Ils ont tous deux de belles qualités littéraires. Catherine est brillante et terriblement lucide, mais tellement submergée par cette sorte de malheur féminin en amour, et Anaïs est merveilleusement plus libre, elle va où le vent la porte, et aime l'amour avec gourmandise, tout en n'excluant pas une profonde capacité d'analyse, sur les tourments qu'il  suscite parfois.


Christine Filiod-Bres
13 août 2014




Catherine Pozzi - 1882 - 1934






dimanche 10 août 2014

Photographie






Anton Tchekhov et sa famille

Pierre D. et la bande du Palais d'Hiver



Photo extraite de la page "Fous d'Anton Tchekhov"



Cette photographie d'Anton Tchekhov, entouré de sa famille, avant le départ pour l'Ile de Sakhaline, a pour moi, qui aime tant cet écrivain, un fort pouvoir d'évocation. Elle est très touchante et romanesque.

Mais là n'est pas la seule raison. Le jeune homme, au dernier rang, à gauche, à côté du chapeau, qui tient dans sa main une canne ou un bâton, on ne sait trop, me rappelle un très cher ami de mon adolescence, Pierre D., fils de Russes blancs, émigrés en France.

Je me souviens de l'appartement de ses parents, où je me rendais souvent, de cette merveilleuse atmosphère reconstituée de l'ancienne Russie, qui fascinait la toute jeune fille que j'étais, pourtant familiarisée avec les traditions slaves. Les tapis colorés sur les tables, les icônes, le samovar, les nuages de la fumée des innombrables cigarettes que fumait sa mère ...



Photo C. FB - Mon petit cabinet de curiosités russes et grecques


Pierre D. était un garçon sensible et droit, idéaliste aussi, et ressemblait beaucoup à ce jeune homme sur la photo, les pommettes hautes, typiquement slaves, les yeux presque bridés, le nez un peu en l'air, ce type russe, reconnaissable entre tous.  

Une très belle période de mon adolescence a resurgi lors de la découverte de cette photo, et les souvenirs de la bande d'amis que nous étions, dite celle du "Palais d'Hiver" ... Une époque à jamais envolée et le souvenir émouvant de l'éternelle jeunesse.



Christine Filiod-Bres
10 août 2014



Anton Tchekhov - 1860 - 1904